Les élections professionnelles n’attirent pas grand monde
Les SAS (Sans appartenance syndicale) ont raflé 64,24% des postes, suivis, loin derrière, par l’UMT 13,74%.
A. Masnour/maroc-hebdo
Les élections professionnelles se sont déroulées dans l’indifférence générale. Pourtant, c’est tout le salariat marocain qui votait pour être représenté dans les administrations, les entreprises publiques et le secteur privé. Une opération gigantesque, avec une trentaine de centrales syndicales en course, une véritable pléthore, dont cinq ou six sont réellement représentatives.
Sur les 6.678 délégués du personnel élus, tous secteurs confondus, les SAS (Sans appartenance syndicale) ont raflé 64,24% des postes, suivis, loin derrière, par l’UMT 13,74%; arrivent ensuite la CDT 7,71%; l’UGTM 5,79%; l’UNTM 3,78% et la FDT 2,88%.
Que nous apprennent ces statistiques? Deux choses essentiellement. Un. À l’image du paysage politique, le monde syndical dont il est le prolongement est un véritable cafouillis de sigles et d’échoppes aussi répétitifs qu’inextricables. Les salariés sont les premiers à s’y perdre, à tel point qu’ils ont botté en touche en votant massivement SAS. Deux. Quant à savoir qui représente quoi, on est pour le moins fixé. Ce ne sont pas les syndicats, dans leur foultitude, avec leur score collectif de 35,76%, mais les SAS, à savoir un ensemble d’individus non-homogènes, donc non identifiables en tant que groupe. Cette situation n’est pas saine, pour la simple raison qu’un syndicalisme organisé, structuré, ayant pignon sur la réalité des salariés, est indispensable, à plus d’un titre.
Représentativité
Faut-il rappeler que le syndicat n’est pas seulement une force de pression et de revendication, mais aussi une source de propositions? Il est de ce point de vue incontournable dans les négociations sociales. Il témoigne aussi d’une société où les partenaires sociaux et les pouvoirs publics se parlent, communiquent et partent à la recherche de solutions dans le calme et la sérénité. Un facteur de développement culturel, même lorsque les salariés descendent dans la rue pour user de leur droit de manifester et de rechercher l’appui de l’opinion publique. Ce n’est pas ce qu’on a vu lors de la dernière grève de transports, qui a failli asphyxier le pays durant une dizaine de jours.
Ceci n’est qu’un exemple, spectaculaire certes, parmi la multitude d’arrêts de travail sur le tas et sans négociateurs avérés et reconnus. Un chiffre suffit pour illustrer cet état de fait: 73% des entreprises marocaines avouent ne pas avoir de comité syndical. Déficit d’activisme des syndicats ou déni patronal du droit syndical; c’est selon et c’est souvent les deux. Toujours est-il que le taux de syndicalisation ne dépasse pas 7 à 8% du salariat. On pourra toujours dire qu’il en est de même en France. Sauf que le contexte socio-politique et le mode de fonctionnement ne sont pas les mêmes, pas plus que le rapport de cause à effet. Comparaison n’est pas raison.
Il reste une ultime parade à cette déconfiture syndicale. Les Mahjoub Benseddik, Noubir Amaoui, Hamid Chabat, Mohamed Azzouzi et Mohamed Yatim; en somme les cinq majeurs; pourraient se constituer en syndicat de chefs pour préserver leur poste contre toute mauvaise fortune. Il reste à rappeler que les délégués du personnel élus participeront, en tant que grands électeurs, à l’élection d’une partie du tiers-sortant de la chambre des Conseillers. Le spectacle continue. À huit clos.