Ayant rompu avec l’USFP, en 2002, et ayant été abandonné par
la majorité des figures politiques historiques de la gauche socialiste après le
divorce avec le CNI, Noubir Amaoui se devait de chercher un autre appui
politique. Les islamistes d’Al Adl Wal Ihssane saisissent l’occasion et font
leur entrée en jeu.
Ces derniers, après avoir épuisé toutes les voies possibles pour s’imposer en
tant qu’acteur politique pouvant obliger l’Etat à accepter leur mouvement en
tant qu’interlocuteur politique, ont fini par trouver une brèche : la voie
du syndicalisme. Ayant été fragilisés par les différents échecs politiques
qu’ils ont essuyés suite à des erreurs stratégiques et des actions improvisées
et hasardeuses comme le plan foireux du «rêve du cheikh» annonçant la «grande
Kawma (soulèvement)» pour 2006, les dirigeants d’Al Adl Wal Ihssane – notamment
l’aile dirigée par le chef du cercle politique Abdelouahed Moutawakil – veut
sonder la voie du syndicalisme. L’opportunité que leur offre la CDT est une
«bénédiction» à laquelle ils ne s’attendaient même pas. Même si cela fait
plusieurs années qu’ils ont infiltré les rangs de la centrale syndicale où ils
sont très présents. Une présence que les dirigeants historiques de la CDT ont
fermé l’œil pour des raisons stratégiques.
Aussi, dès que le leader de la CDT avait-t-il annoncé le retrait de ses
conseillers de la deuxième Chambre du Parlement, puis la fixation de la date du
21 mai pour l’organisation d’une grève générale, la coupole dirigeante d’Al Adl
Wal Ihssane s’est précipitée de passer un mot d’ordre à ses adeptes pour qu’ils
s’associent à l’appel de la CDT. Le retrait du Parlement étant interprété et
vendu aux militants du mouvement islamiste comme un rejet des institutions
démocratiques, la tâche a été rendue facile puisque la CDT semble ainsi
rejoindre la position politique d’Al Adl Wal Ihssane qui ne reconnaît pas la
légitimité des institutions du système démocratique marocain. Le mot d’ordre de
soutien de la grève est passé par les canaux habituels de communication
installés par Al Adl Wal Ihssane. Une sorte de communication pyramidale comme
dans toutes les organisations clandestines où l’écrit cède la place à l’oral et
la transparence s’efface au profit du cryptage.